Bonjour et bienvenue dans la Minute Sciences Co. Je suis le professeur Axone et je vais vous accompagner, chaque semaine, dans la découverte de concepts de sciences cognitives. Ensemble nous chercherons à en apprendre plus sur le fonctionnement de notre cerveau, mais surtout de celui de nos élèves.
Pour cette sixième minute, je vous propose de parler de l’évaluation et du retour sur erreur. Des exemples d’outils et des pistes de mise en œuvre pédagogique vous seront proposés.

L’erreur et l’évaluation en questions
L’erreur doit désormais être envisagée comme un GPS qui guide l’enseignant, révèle les zones de fragilités, et permet à l’apprenant de mieux comprendre ses propres processus d’apprentissage.
Stanislas Dahaene précise d’ailleurs l’importance pour les enseignants d’expliquer aux élèves que " tous les enfants doivent déployer des efforts et s’engager au risque de l’erreur, que c’est la seule façon de développer les circuits de son cerveau" (Dahaene 2018, p. 281)
Dans ce contexte, l’erreur devient alors un point d’appui pour faire progresser l’élève, et non pas une sanction qui vise à statuer sur une performance : en intégrant des pratiques telles que le feedback formatif, la métacognition ou le guidage attentionnel (Roussel 2021), il est tout à fait possible de transformer l’erreur en moteur d’apprentissage.
C’est en cela que l’intelligence Artificielle peut renforcer le principe de l’erreur, en permettant de concevoir des environnements d’apprentissage adaptatifs, où les erreurs sont analysées pour proposer des parcours personnalisés.
L’apprentissage par traitement de l’erreur du cerveau peut être résumé selon deux modèles :
- Le cerveau prédictif : modèle selon lequel le cerveau anticipe constamment les informations sensorielles et ajuste ses prédictions en fonction des erreurs. Il est chargé de prédire et corriger en temps réel.
- Le cerveau Bayésien : modèle mathématique du cerveau considéré comme un système de raisonnement probabiliste qui met à jour ses croyances selon la règle de Bayes.
Il existerait donc un réel écart entre la prédiction du cerveau et le retour d’information provenant de l’environnement extérieur. Cette différence est appelé erreur de prédiction ou écart de prédiction (André et al. 2023).
Stanislas Dehaene, dans son analyse du traitement de l’erreur basée sur ces deux modèles, explique que, pour modifier ses représentations de la réalité extérieure, le cerveau procède en trois étapes :
- Estimation descendante, basée sur le modèle interne en vigueur
- Mise en parallèle de ces estimations avec les données entrantes externes, générant ainsi des signaux d’erreur
- Recours à ces signaux d’erreur pour modifier le modèle interne
Deux éléments sont ainsi essentiels à l’apprentissage :
- La formulation d’une prévision concernant le monde extérieur (participation active)
- La rétroaction (ou feedback en anglais) sous forme de signaux d’erreur, provenant de l’environnement ou de l’enseignant.
Ainsi, pour qu’un apprenant tire le meilleur parti des signaux d’erreur et apprenne efficacement, il faut que son environnement lui apporte le plus rapidement et le plus précisément possible, un retour d’information sur l’erreur.
Jonas Erin, dans son intervention à la table ronde de France Education International, souligne par ailleurs que la rétroaction est l’un des mécanismes les plus importants du processus d’apprentissage, peut-être pas encore assez pratiqué par les enseignants (Erin 2025).
Selon le classement de John Hattie (2009), incluant 250 millions d’élèves, 800 méta-analyses et 50 000 études individuelles, le retour d’information sur l’erreur par l’enseignant est le facteur de réussite scolaire le plus puissant parmi les 138 analysés.
Voici quelques suggestions de mises en œuvre pratiques en classe :
Rétroaction personnalisée et adaptative
- Offrir une rétroaction instantanée sur les erreurs, en détaillant les raisons de leur occurrence.
- Suggérer des plans de remédiation différenciés adaptés au profil cognitif de l’apprenant.
- Exemple : un chatbot peut identifier les erreurs de logique en mathématiques et suggérer des analogies ou des exemples contraires.
Étude des erreurs répétées
- Reconnaître des schémas d’erreurs (grammaticales, logiques, lexicales...)
- Exemple : un instrument d’analyse sémantique qui identifie les confusions conceptuelles dans les textes d’élèves en SVT ou en histoire.
Promouvoir l’expression des erreurs
- Formuler des interrogations métacognitives
- Contribuer à l’élaboration de schémas d’erreurs
- Exemple : demander à une intelligence artificielle générative d’accompagner un élève dans l’analyse de ses erreurs suite à une évaluation, en lui posant des questions comme : « Quel était ton raisonnement au moment où tu as lu la question ? », « Pourquoi as-tu répondu de cette façon ?", "Pourquoi as-tu choisi cette option ? »
À vous de jouer !
Pour finir, je vous propose un mini défi : que puis-je faire dès demain pour utiliser l’intelligence artificielle pour faire de la rétroaction, en respectant les principes des sciences cognitives ?
Lors de ma prochaine séance, je me propose de créer une activité à l’aide d’une
IAg afin d’offrir aux élèves une rétroaction personnalisée et constructive sur une production écrite. En m’appuyant sur les principes des sciences cognitives je propose aux élèves une auto-analyse de leurs erreurs en posant des questions ciblées.
Ressources complémentaires
- Hattie, J. (2009). Visible learning : A synthesis of over 800 meta-analyses relating to achievement. Routledge.
- André, C., Guilleray, M., & Berthier, A. (2023). Innover avec les sciences cognitives. ESF Sciences Humaines.
- Roussel, S. (2021). L’approche cognitive en didactique des langues. Éditions Didier.
- Dehaene, S. (2018). Apprendre ! Les talents du cerveau, le défi des machines. Odile Jacob.
- Dehaene, S. (2015, février 3). L’engagement actif, la curiosité, et la correction des erreurs Cours au Collège de France. Collège de France.
- Erin, J. (2025, 17 février). Regards à l’international. Entretien avec Jonas Erin.

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