La minute SciencesCo

Minute n°3 : la compréhension

À chaque semaine sa notion

La Minute SciencesCo est un rendez-vous hebdomadaire qui a pour objectif de proposer un moment d’acculturation à différentes thématiques traitées par les sciences cognitives.

Mis à jour le jeudi 19 juin 2025

Bonjour et bienvenue dans la Minute SciencesCo. Je suis le professeur Axone et je vais vous accompagner, chaque semaine, dans la découverte de concepts de sciences cognitives. Ensemble nous chercherons à en apprendre plus sur le fonctionnement de notre cerveau, mais surtout de celui de nos élèves.

Pour cette troisième minute, je vous propose de parler de la compréhension, des différents types, des freins, des leviers, et des pistes de mise en œuvre pédagogique en classe pour aider les élèves à mieux comprendre.

Cette image montre le Professeur Axone tenant une montre à gousset à la main
Vous êtes prêts ? Top chrono !

La compréhension en question

« Comprendre ne relève pas d’une fonction cognitive unique, mais d’un ensemble de processus pour lesquels l’humain est conçu dès sa naissance » (André et al. 2023).

La compréhension consiste donc à construire du sens à partir d’informations nouvelles, en les reliant à des connaissances préalables, et elle porte sur des systèmes (un système étant un ensemble d’éléments unis de façon cohérente : ex. une phrase, un texte, une famille etc.). Ainsi, la compréhension est un ensemble de processus cognitifs de traitement d’informations, qui mettent en relation des informations perçues de l’extérieur, avec notre capital mémoriel.

3 processus sont à l’œuvre dans la compréhension :
  • Le traitement de surface : identification des éléments ponctuels (mots, signes présents en mémoire)
  • L’élaboration des liens : traitement sémantique
  • L’extension : lien avec des concepts déjà assimilés

« Comprendre un concept, c’est l’intégrer à ses propres connaissances en vue d’en tirer toutes les conséquences, du moins celles qui permettent de former de nouveaux raisonnements, de nouvelles déductions pertinentes et significatives” (Proust 1). Et aussi : « apprendre change les connexions neuronales présentes dans notre cerveau, et ces changements sont possibles grâce à ce qu’on appelle la neuroplasticité » (Masson 2019).

En classe, comprendre, c’est pouvoir reformuler, transférer, appliquer ou expliquer un concept dans un autre contexte. Mais, d’après Joëlle Proust, « les élèves peuvent croire comprendre, sans comprendre » (Proust 2).

Il existe donc deux formes de compréhension :

  • La compréhension superficielle : je comprends le texte car c’est du français.
  • La compréhension profonde : je fais des liens entre les nouvelles notions et les connaissances que j’ai déjà.

Dans le processus de compréhension on note également le rôle essentiel de la mémoire. En effet, le traitement de surface implique les rôles des mémoires perceptives et de la mémoire sémantique à long terme (identification des éléments du système, identification des liens entre les éléments). Et, « comprendre » c’est bien une construction continue qui s’appuie sur des acquis en mémoire.

Ainsi, l’enseignant aide les élèves à comprendre en nourrissant leur mémoire (vocabulaire, concepts) car plus nos schémas sont complètement formés et interconnectés entre eux, plus ils peuvent être explorés et rappelés avec fluidité et précision. De là vient l’expression de Daniel Willingham, « Understanding is memory in disguise » (« la compréhension est de la mémoire déguisée ») (cité dans Dehaene 2018).

La compréhension en classe peut être entravée par une diversité de facteurs cognitifs, pédagogiques et affectifs : 
  • La charge cognitive excessive : trop d’informations simultanées à traiter et sans hiérarchisation, ni soutien visuel ou verbal.
  • Le manque de connaissances préalables : prérequis permettant à l’élève de faire des liens.
  • Le langage trop complexe ou implicite : comme le soulignent Lavieu-Gwozdz et Pagnier (2022), un discours trop abstrait ou insuffisamment contextualisé empêche les élèves de se construire une représentation mentale claire des situations évoquées.
  • Les distractions ou manque d’attention : les distractions internes (manque d’intérêt, faible motivation) ou externes (environnement bruyant, sollicitations numériques) peuvent nuire à l’attention soutenue nécessaire à la compréhension.
  • Les contenus enseignés se situant hors de la zone de développement proximal : lorsque les tâches proposées sont trop éloignées de ce que l’élève peut accomplir avec un guidage, elles deviennent inaccessibles (Canut et al. 2013).

A cela s’ajoutent d’autres facteurs moins visibles mais tout aussi déterminants comme : la clarté du but d’apprentissage, la formulation des consignes, ou la mobilisation des fonctions exécutives telles que planification, l’inhibition, la flexibilité cognitive, essentielles pour réguler l’activité mentale.

Puisque la compréhension n’est pas binaire (j’ai compris ou je n’ai pas compris) mais qu’au contraire chaque individu construit un certain niveau de compréhension en fonction des informations disponibles, les enseignants peuvent contribuer à élever le niveau de compréhension de tous les élèves par le biais de quelques gestes clés, tels que :
  • Créer des conditions favorables à la compréhension : construire des séquences allant du simple au complexe, proposer des activités avec un niveau de difficulté adapté (ZDP).
  • Favoriser les conditions favorables à la compréhension avant l’activité : mobiliser les prérequis, convoquer les modèles mentaux, faire s’approprier l’objectif d’apprentissage par les élèves, différencier objectif d’apprentissage, tâche scolaire et consigne.
  • Favoriser l’amélioration du niveau de compréhension en cours d’activité : vérifier régulièrement la compréhension de l’objectif d’apprentissage, favoriser des questionnements du type : « Qu’avez-vous compris ? », proposer des exercices génératifs intercalaires, favoriser les interactions entre pairs structurées, proposer des séances en enseignement explicite.
  • Favoriser l’amélioration du niveau de compréhension à la fin d’une activité : proposer des exercices génératifs finaux, favoriser des discussions métacognitives, favoriser l’élaboration des traces écrites par les élèves, proposer aux élèves de faire un bilan de leurs apprentissages (évaluations flash en fin de séance), donner du feedback immédiat.
  • Apprendre aux élèves à comprendre : former les élèves à ce qu’est la compréhension.

L’analyse de la littérature effectuée par Fiorella et Mayer (2015, 2016) met en avant l’efficacité des activités dites génératives pour favoriser une réelle compréhension en classe. Celles-ci amènent les élèves à établir des liens entre les informations présenter en les reliant aux connaissances préalables stockées en mémoire.

Voici 5 activités possibles (Parmentier 2020) :

  • Tester : soit se remémorer des contenus, soit répondre à des questions, soit reconnaître des éléments présentés parmi d’autres.
  • Susciter le questionnement  : générer des inférences, des suppositions qui vont au-delà du contenu strict du document.
  • Faire résumer : reformuler les idées principales d’un document avec ses propres mots.
  • Faire des tableaux de comparaison : faire comparer des concepts en fonctions de critères (très utile notamment pour les élèves plus en difficultés).
  • Faire des cartes conceptuelles : élaborer des représentations des liens entre différents concepts sous forme de graphes.

« Le numérique n’est pas une solution miracle aux difficultés des élèves. Cependant, il peut favoriser certaines approches pédagogiques qui facilitent l’apprentissage des élèves » (Tricot 2022).

En effet, lorsqu’il est intégré de manière réfléchie dans une démarche pédagogique cohérente (Nissen 2004), le numérique devient un levier puissant pour soutenir la compréhension en classe. Il permet notamment :

  • La mémorisation active, grâce à des applications comme Anki ou Wooflash, qui exploitent la répétition espacée et l’auto-évaluation
  • Le feedback automatisé, via des exercices autocorrectifs qui offrent une rétroaction immédiate et individualisée
  • L’accessibilité accrue, avec des outils de lecture vocale, de sous-titrage ou de traduction qui facilitent l’inclusion
  • La personnalisation des parcours d’apprentissage, rendue possible par l’intelligence artificielle, les plateformes adaptatives (adaptive learning) ou des outils comme Nolej.
    Ces dispositifs permettent de mieux répondre à la diversité des profils d’élèves, de renforcer leur engagement et de favoriser une pédagogie différenciée.

Toutefois, leur efficacité repose sur la capacité des enseignants à les intégrer de manière critique et pertinente dans leurs pratiques.

À vous de jouer !

Pour finir, je vous propose un mini défi : que puis-je faire dès demain pour aider mes élèves à mieux comprendre ?

Lors de ma prochaine séance, j’identifie quelques freins et je mets en œuvre au moins 2 des 5 activités génératives possibles.

Ressources complémentaires

Bibliographie

Sitographie

Cette image montre le Professeur Axone nous saluant
À la semaine prochaine pour une nouvelle minute SciencesCo !

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Article rédigé par Antonella Corvaglia